Industries et Techniques

Numéro 741, paru le 10/09/1993, page 133, écrit par Michel LE TOULLEC

L'invention d'un chercheur indépendant

Le verre de récupération conducteur

Les propriétés de ce matériau pourraient convenir au transport d'électricité en milieu corrosif et à haute température, micromotorisation, etc... .

La valorisation des matériaux n'a pas fini de surprendre; ainsi, le verre recyclé conducteur d'électricité. Un produit orignal mis au point par un chercheur indépendant, René TEMEY, et qui vient d'être caractérisé au laboratoire de cristallographie et sciences des matériaux de l'université de Caen, une unité de recherche associée au CNRS. Le secret de ce verre conducteur réside dans sa formulation : essentiellement du verre de récupération, sous forme de gobelets ou de verre plat, plus quelques oxydes métalliques ( cuivre et argent ). Il en résulte un matériau doté d'une résistivité électrique qualifiée d'excellente par le laboratoire du CNRS; bien que plus élevée que celle du cuivre, elle atteint 7.10 \5 ^.cm à température ambiante. De plus, la variation thermique de la résistivité entre - 200 et + 400°C se traduit par un coefficient de température positif, caractéristique d'un métal. Il s'agirait du premier verre silicaté présentant une conductivité métallique même à température élevée ( on parle ici de conduction électrique ). Il existait déjà des verres métalliques aux propriétés conductrices et magnétiques intéressantes, mais rarement au-delà de 160°C, où ils se recristallisent et s'oxydent. Enfin, il serait intéressant de rechercher en direction de la supraconductivité, étant donné le comportement de ce verre aux basses températures.

Les applications pourraient concerner le transport du courant électrique en milieu corrosif ( les verres silicatés résistent à la plupart des agents chimiques ) et à haute température. Bon conducteur électronique, le matériau doit également être un intéressant conducteur ionique; l'argent est très « mobile » dans une matrice silicatée. Le matériau serait alors un candidat potentiel au stockage de l'énergie électrique sous forme d'électrolyte solide. Reste à voir s'il est possible de remplacer ce métal par un autre, moins coûteux, tout en maintenant les propriétés étonnantes du matériau. René TEMEY entrevoit des débouchés dans le revêtement des parois de cavités hyperfréquences d'accélérateurs de particules. L'intérêt serait d'améliorer la qualité des faisceaux accélérés tout en réduisant la puissance électrique nécessaire. De plus, en fonction des métaux ajoutés au verre de récupération, il est possible d'obtenir des champs magnétiques très intenses, ce qui pourrait intéresser la spectrométrie RMN, la microscopie électronique .... Le matériau pourrait entrer dans la conception de micromoteurs divers, ou permettre d'enterrer les lignes d'EDF, sans craindre les problèmes de corrosion. Son inventeur recherche des partenaires pour dépasser le stade de l'échantillon de laboratoire.